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A Montsuzain, visite au cœur de l’usine d’eau potable

À 20 km de Troyes, l’usine de traitement de l’eau potable du COPE de la région de Montsuzain, exploitée par la Régie du SDDEA, a ouvert ses portes récemment aux étudiants de Sainte-Maure et aux élus des COPE de la région.

Construite en 2014 à l’écart de la commune, l’usine de Montsuzain se dissimule dans une construction que l’on pourrait prendre de loin pour une maison particulière, à quelque 110 m du site de captage, près de la Barbuise. Elle a reçu la visite de huit étudiants de première année de BTS Gestion et maîtrise de l’eau (Gémeau) au lycée privé de Sainte-Maure. Ceux-ci ont mis à profit leur semaine de classe d’eau pour effectuer des visites sur le terrain et découvrir le cycle de l’eau sous toute ses formes. Tous passionnés par les questions liées à l’environnement et à l’eau, ils commencent à en découvrir les métiers. Le SDDEA et sa Régie ont accompagné ces découvertes pédagogiques et le 21 septembre les étudiants ont visité l’usine de Montsuzain, ainsi que, deux jours plus tard, la station d’épuration de Méry-sur-Seine.

L’usine de Montsuzain répond à une double problématique : produire de l’eau potable en traitant les nitrates et les pesticides excédentaires présents dans l’eau du captage. Maxime Fleury, ingénieur eau potable au Service Maîtrise d’œuvre et Etudes de la Régie du SDDEA (Direction du Patrimoine), a accueilli et guidé les étudiants au sein des installations pour leur en expliquer le fonctionnement détaillé. Pierrette Geoffray, enseignante spécialisée en traitement des eaux, et Claude Fournier, professeur d’hydraulique et ancien conseiller municipal à Montsuzain, les accompagnaient également.

Le procédé de dénitrification biologique

« L’usine produit en moyenne 850 m3 d’eau potable par jour », explique Maxime Fleury. « La problématique principale, ce sont les nitrates. Ils peuvent être traités de différentes manières. Ici on procède par dénitrification biologique : des bactéries dénitrifiantes vont consommer l’oxygène présent dans les nitrates, pour assurer leur développement. Le produit résultant de cette réaction est l’azote gazeux (transformation des nitrates en azote gazeux) que l’on peut rejeter dans l’air, puisqu’il s’agit de l’un de ses principaux composants. » Ce procédé permet ainsi l’élimination biologique de l’azote présent dans l’eau. A l’usine de Montsuzain, seule une partie de l’eau en provenance du captage est traitée dans le filtre biologique et un mélange d’eau du captage est effectuée avec l’eau filtrée afin de viser « un objectif de 25 mg/l en sortie d’usine », précise Maxime Fleury, soit moitié moins que le seuil autorisé pour la consommation humaine (50 mg/l).

Le procédé de dénitrification fait aussi intervenir des produits chimiques. Notamment l’éthanol, injecté dans le filtre, source de nourriture pour les bactéries dénitrifiantes. Et l’acide phosphorique, qui permet d’équilibrer la réaction en limitant la production de nitrites et de produire seulement de l’azote gazeux. 

 

Un deuxième filtre permet de capter les résidus de produits phytosanitaires présents dans l’eau. Les charbons actifs présents dans le filtre permettent d’absorber les pesticides. Une molécule en particulier reste très présente dans les eaux brutes : l’atrazine. « C’est un produit qui était surtout utilisé pour la culture du maïs et qui a été interdit en 2003 », se souvient Claude Fournier. L’enseignant était alors conseiller municipal et il a participé à la genèse de l’usine de Montsuzain, en partenariat avec le SDDEA, alors prestataire (lire ci-dessous)« Pourtant le taux d’atrazine déséthyl dans les eaux a continué d’augmenter à cause des résidus présents dans les sols. » 

« Beaucoup de programmation »

À l’intérieur de l’usine, les étudiants de Sainte-Maure ont pu découvrir des installations insoupçonnables depuis l’extérieur, et notamment les deux filtres : deux citernes bleues massives de plusieurs mètres de haut, alimentées par les pompes du captage. Le fonctionnement de l’usine est largement automatisé, et un technicien d’usine, Laurent Lemerle, intervient sur le site deux à trois fois par semaine. « Une usine de production d’eau potable, c’est beaucoup d’automatisation afin de faciliter l’exploitation », explique Maxime Fleury.

Le lavage des filtres est effectué une fois par jour avec de l’eau traitée mais non désinfectée car le chlore, utilisé pour désinfecter l’eau potable, nuirait à l’équilibre bactériologie du filtre à nitrates. L’eau issue du lavage est rejetée en sortie d’usine dans un bassin de filtration extérieur, planté de roseaux, similaire à ceux d’une station d’épuration. Les roseaux se nourrissent d’une large partie des polluants contenus dans l’eau. Puis celle-ci gagne un second bassin, de réinfiltration, où elle peut regagner la nappe phréatique.

Après leur visite de l’usine, les étudiants de Sainte-Maure ont ensuite découvert le site des captages, situé à quelques centaines de mètres. Cette journée leur a permis d’aborder sur le terrain des notions chimiques et techniques évoquées en cours, et de découvrir de nombreux aspects de la production d’eau potable.

Solution la moins coûteuse

L’usine de Montsuzain produit de l’eau potable pour les habitants de 11 communes, au sein de 4 services d’eau. Avant la construction de l’usine de traitement de l’eau potable de Montsuzain et sa mise en service en 2014, trois syndicats des eaux et une commune disposaient de la ressource provenant de deux puits et deux stations de pompage. Mais « la teneur en nitrates dans l’eau augmentait lentement depuis fort longtemps, et on trouvait aussi la présence de métabolite d’atrazine », se souvient Claude Fournier. Conseiller municipal à l’époque, l’enseignant en hydraulique a suivi le dossier de bout en bout. « A l’époque le SDDEA et sa Régie étaient prestataires de services. » Après une mise en demeure de l’Agence Régionale de Santé liée à la teneur excédentaire en nitrates, les syndicats se sont réunis et ont demandé au SDDEA d’étudier diverses solutions pour rétablir une bonne qualité de l’eau. « La filière de dénitrification bio était connue mais sur des volumes de production plus importants. Les élus ont visité une exploitation de ce type dans le Loiret et finalement cette solution s’est avérée la moins coûteuse », se souvient encore Claude Fournier. L’investissement de Montsuzain a ainsi reçu le soutien des élus puis celui de l’Agence de bassin Seine-Normandie.

Les élus à la découverte du site

Les élus des Cope de la région de Montsuzain ont à leur tour visité l’usine de traitement de l’eau potable, le 9 octobre, par un beau samedi matin ensoleillé. Denis Pottier, Directeur des Territoires et Directeur du Territoire Nord pour le SDDEA et sa Régie, ainsi que Benoît Boidard, chef de service exploitation Eau Potable à la Régie du SDDEA, ont accueilli les visiteurs avant de les guider au sein des installations. Si pour certains, la visite était une découverte, d’autres connaissaient très bien l’histoire de l’usine. C’est le cas de de Denis Frérotte, Président du Cope des Sources de la Barbuise : « J’ai suivi la construction de l’usine de A à Z », se souvient-il. « Il fallait choisir le matériel. C’était très intéressant mais difficile aussi. » En passant devant le bassin de filtration planté de roseaux, il explique : « La mise en route a été longue car les roseaux ont dû pousser. » En poursuivant la visite, Denis Pottier a souligné pour sa part la spécificité du site de traitement de l’eau potable de Montsuzain : « C’est la seule usine que l’on exploite qui traite deux éléments chimiques, les nitrates et les produits phytosanitaires. Les autres en filtrent un seul, qui peut aussi être le fer ou le manganèse par exemple. » Malgré la présence récurrente d’atrazine, molécule interdite depuis 2003 mais toujours présente dans les sols, il note une évolution encourageante : « On commence à sentir le plafonnement de certaines molécules grâce aux pratiques agricoles qui ont énormément évolué. »

En ce qui concerne la production de nitrates, elle est aussi alimentée par la nature, qui en produit par le biais de certains processus comme la décomposition végétale. La baisse des taux est donc un processus très long. « Idéalement, à la fin de l’espérance de vie de l’usine, de vingt à vingt-cinq ans, l’objectif est que l’on n’ait plus besoin de ce type d’infrastructure », poursuit Denis Pottier. Cette logique de reconquête de la qualité de l’eau fait pleinement partie de la Stratégie 2100 portée par le SDDEA et sa Régie, notamment dans sa démarche d’Animation Territorialisée. Issue d’un partenariat avec la Chambre d’Agriculture de l’Aube,
elle est en cours de déploiement.

Posted in COPE EP de la Région de Montsuzain, Eau Potable